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Boulogne sur mer : une ville ben ordinaire. Vie politique judiciaire et anecdotique
3 mai 2009

Si Versailles m’était conté. Le jardin devant la Mairie

Si Versailles m’était conté.
Le jardin devant la Mairie.

Autrefois quand un manant voulait rendre  visite à son seigneur et maitre, j’ai nommé le comte Frédérique, le manant pouvait se rendre en voiture jusqu’aux portes du logis seigneurial : on pouvait se garer devant la Mairie.
Cette situation était insupportable, songez un manant, un gars qui travaille de ses mains, avait quasiment le mêmes droits que le Seigneur des lieux, un notable dont la paume est satinée par le contact des lettres de cachet et des sièges en velours .
Conscient de la gravité du problème, le comte Frédérique  convoqua ses conseillers et leur dit : il faut introduire une distance entre moi et mon peuple, que mon élévation se voit, se sente, car si mon élévation ne se voit pas à quoi sert de s’élever, je vous le demande ???
Les conseillers opinèrent du chef.
Donc j’attends vos idées.
On pourrait mettre votre bureau au deuxième étage, sussura le premier conseiller, vous seriez plus élevé.
Je parlais d’élévation sociale, mais puisque grimper dans un cagibi, dont le plancher aspire à un repos bien mérité, semble à Monsieur mon premier Conseiller le comble de l’élévation, je lui accorde cette grâce. D’autres idées ?
Les conseillers se mirent à contempler le bout de leurs souliers.
Messieurs j’attends, ce que je n’aime guère.
A défaut d’une distance verticale, nous pourrions, entre Vous et vos visiteurs mettre une distance horizontale, un obstacle, qui rendrait votre rencontre encore plus désirable, tenta le deuxième conseiller.
Très bien.
Toutefois nous devons respecter les formes de la démocratie, cet obstacle doit être le même pour tous, et avoir en outre l’apparence de l’intérêt général.
C’est évident.
Tout d’abord je note que la Mairie se trouve en haut d’une côte, et que les quémandeurs de tout poil doivent monter vers vous, ce qui est bien mais insuffisant car ils peuvent y monter en voiture, sans effort et se garer devant la porte de votre demeure, ce qui est insultant pour votre Grandeur.
Continuez.
Il faut donc, devant la Mairie interdire tout stationnement, autre que pédestre, au nom de la lutte contre la pollution.
Et ou mettrai-je ma chaise à porteurs, demanda le comte Frédérique en fronçant le sourcil ?
Votre chaise est à porteurs, donc pédestre, elle n’est pas concernée par l’interdiction.
Interdire, cela fait répression, et sonne furieusement réactionnaire, ce qui ne saurait convenir à Monsieur le Comte, qui est de gauche, intervint le troisième conseiller.
Exact, dit le comte Frédérique, réprimer me fait horreur, Monsieur mon deuxième conseiller à la mémoire qui flanche.
Le deuxième conseiller ravala sa bave, sa bile et sa rancœur, et dut laisser la gloire au troisième conseiller qui conclut : le mieux serait de créer un jardin en face de la Mairie, à la place du parking.
Excellente idée, s’exclama le comte Frédérique, avec un arbre centenaire au milieu. L’été je pourrait m’asseoir sous son ramage et y pendre haut et court mon opposant, ce Honvault…
C’est que vos ancêtres ont aboli la pendaison, intervint le premier conseiller.
Quelle idée bizarre, et très gênante.
Bizarre, mais de gauche.
Alors je m’incline, ce Honvault aura sa misérable vie sauve car je suppose qu’on ne peut pas écarteler non plus.
Hélas non, vos ancêtres ont aboli tout forme de peine capitale.
Tant pis, cela m’aurait fait grand plaisir de voir ce gredin implorer ma grâce, et d’un autre côté il est bon que je montre l’exemple de ma grandeur d’âme.
Et de votre tendance naturelle au pardon,
Monsieur mon troisième conseiller aurait-il une grosse bévue à se faire pardonner, interrogea le comte ? Je lui confie donc le dossier jardin, cent mille écus d’or à prendre dans la bourse communale et trente jours de délai, ce qui me paraît tout à fait raisonnable. Tout content de lui le comte Frédérique se leva et s’en alla manger.
Les puissants proposent, les événements disposent. Au fond du trou choisi pour planter l’arbre, l’on trouva une tombe mérovingienne.  Sommé par le Roi de laisser les mérovingiens dormir en paix, le comte Frédérique dut se rabattre sur un arbrisseau en pot, qu’on posa sur le sol entre quatre jardinières et tout une rang de barrières métalliques repeintes en vert pout faire plus naturel.
Le bon peuple n’est pas si bête qu’on veut bien le dire, et il eut vite fait de calculer que 5 pots à 100.000 écus, cela fait 20.000 écus le pot. Les pots disparurent à la vitesse de l’éclair, aussitôt remplacés, aussitôt volés.
Soucieux de faire triompher le Droit et la Loi, le comte Frédérique mit un gendarme devant chaque pot, en pure perte.
Depuis il reste devant la Mairie, les barrières vertes, quatre gendarmes en armes et un panneau, « Jardin de la Mairie », ce qui fait beaucoup rire nos amis anglais.
C’est normal, ils ne payent pas, eux.

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